Etat de l'Industrie du PC au 02/07/2004

l'industrie graphique en pleine révolution

Dans un coin, nous avons le X800, avec 160 millions de transistors et 12 ou 16 pipelines (suivant qu'on a le PRO ou le XT), et deux pixel shaders pour chaque pipeline (donc 24 ou 32 selon). Dans l'autre coin nous avons le 6800, avec 16 pipelines et 220 millions de transistors (du fait du shader version3).

Si l'on compare la X800 XT avec la 6800 Ultra, alors on se retrouve face au même nombre de pipelines, shaders et largeur de bus (256 bits), ainsi qu'à la même capacité de mémoire (DDR3 à 1,1Ghz). De plus, la finesse de gravure est identique : 0,13 microns.

La seule différence importante entre les deux plus gros concurrents est la fréquence de fonctionnement prévue : 520Mhz pour la X800 XT contre 400Mhz pour la 6800 Ultra. Les deux cartes sont bien plus rapides que leurs prédecesseurs, en offrant une qualité d'image supérieure. Toutes deux ont également besoin de plus de courant que le bus ne peut leur donner, donc ils ont un connecteur additionnel.

Plus de courant se traduit invariablement par plus de chaleur dégagée, donc attention aux refroidisseurs !

Ce qu'il y a de meilleur dans tout ça, c'est que les deux cartes offrent des performances phénoménales - pour des prix non moins importants. L'essentiel, c'est que la concurrence entre ATI et nvidia est visiblement féroce - pour la plus grande joie des joueurs.

Cependant, après s'être fait laminés avec la FX, nvidia a apparemment ressorti le SLI de derrière les fagots. Eh oui, la technologie des bons vieux Voodoo 2 a été remis au goût du jour, et la génération des 6800 serait, dit-on, capable de travailler en tandem. Bien sûr, il faut jouer avec deux cartes identiques, mais les modifications du concept initial apporté par les serfs infatigables pourrait, selon les plus optimistes, s'appliquer à deux cartes 6800 de puissance différentes.

Même s'il faut acheter le même modèle (comme avant), j'imagine bien que la possibilité de se retrouver avec non pas 12 ou 16 pipelines, mais 24 ou 32, ça va en faire baver plus d'un. Ah oui, il y a quand même un petit détail : il faudra vraisemblablement avoir une carte mère qui admette 2 slots PCI express. Et ça, c'est une toute autre histoire.

Intel abandonne Itanic

Le processeur 64 bits préféré d'Intel, le Itanium, va finir par être enterré par Intel. Pourtant, des années de travail et des dizaines de millions de dollars ont été consacrés à cette "révolution" computationnelle. Mais le judicieux pari d'AMD avec l'Opteron, un CPU 64 bits compatible avec le jeu 32 bits des instructions x86 actuels, a bel et bien mis à mort le vaisseau amiral du futur.

Cet échec annoncé d'Intel a été confirmé par une longue agonie de support des partenaires principaux qui ne cessait de diminuer, des ventes se comptant en maigres dizaines, et des performances qui ne résonnaient nullement dans l'esprit des acteurs du marché. En clair, ce veau incompatible avec tout l'existant avait beau se faire pousser au cul par une énorme botte, il n'a pas été foutu de sortir de son étable. La défection tardive d'un partenaire logiciel important a sonné le glas pour ce machin ignoré de tous sauf du département marketing d'Intel.

La mort dans l'âme, les officiers du marketing à Cupertino se sont vu obligés de permettre au Xeon de fonctionner en 64 bits, ce qu'il pouvait faire en fait depuis un bon bout de temps, tout en fusillant en douce le CPU surnommé Itanic (en référence au Titanic, bien sûr) par tous les observateurs de l'industrie.

Je comprends la douleur des ingénieurs qui donné vie à ce brebis galeux, mais il faut bien avouer que personne d'autre ne le regrettera. Sauf peut-être Dell.

Ce que je comprends moins, par contre, c'est cette insistance de la part de certaines personnes dans les sphères influentes des couloirs de l'industrie du PC à s'imaginer qu'ils peuvent imposer au public un choix qui, forcément, rendra nul et inutile tous les achats en matériel et en logiciels précédents. Rappelons que l'Itanium était au départ purement 64 bits. En d'autres termes, ni Windows ni rien qui tourne sous Windows ne pouvait fonctionner avec.

Regardez donc votre CDthèque maintenant et dites-moi que demain matin vous irez joyeusement au supermarché racheter tous ces titres en version 64 bits compatibles Itanium. Mis à part le fait qu'ils n'existent même pas, ça m'étonnerai franchement que qui que ce soit le fasse s'il n'y est pas obligé. Et je ne parle même pas du matos.

En ce qui concerne les sociétés, c'est pire. Microsoft a finalement réussi à dégouter les entreprises de faire des remplacements entiers de leur parc informatique tous les deux ans. Le succès fort mitigé des versions XP et 2003 de Windows et le report de la fin du support pour les versions 2000 et 98 démontre amplement, s'il en était besoin, que les sociétés trouvent que 2000 suffit amplement à leurs besoins, et que Windows Me et XP n'ont pas du tout conquis les humbles chaumières de monsieur tout le monde.

Donc ? A part les joueurs invétérés (dont je suis) qui ont besoin du dernier cri et sont prêts à faire le nécessaire, les autres quidams et même les grandes sociétées trouvent que ce qu'ils ont (ou le moins cher qu'il y ait quand ils l'achètent) suffit bien pour faire tourner un client mail, un Word et un Excel. La demande pour les gros CPU, les cartes graphiques du tonerre et des disques de centaines de Gigas n'existe tout simplement pas. Pourquoi, dans ce cas, jeter ce qu'on a déjà afin d'acquérir le tout de nouveau, en dix fois trop puissant ?

Le pire, c'est de constater qu'il y a au moins un précédent dans l'Histoire du PC : je veux parler du bus MCA. A cette époque glorieuse, IBM était le ténor du marché. Ce qu'IBM voulait, il l'obtenait. Le PC c'était l'idée d'IBM, mais ils ont gaffé parce-que la hiérarchie n'y croyait pas, donc ils n'ont pas déposé les brevets nécessaires. La suite est devenue historique : les petits fabriquants se sont intéressés à ce marché naissant et libre. Ils l'ont tellement investi que les prix ont chutés, ce qui agrandit le marché et fournit de nouvelles opportunités.
Voyant que le marché qu'ils avaient permi de faire naître leur échappait, IBM a voulu recentrer le futur autour de leur marque. Les ingénieurs du Grand Bleu ont donc cogité très fort, et ils ont inventé une nouvelle spécification de bus : le MCA (MicroChannel Architecture). Ce bus est sorti bardé et blindé de brevets, et il était bien entendu totalement incompatible avec le bus ISA, utilisé par tout le monde à l'époque (ce bus ISA peut encore se trouver dans quelques modèles de cartes mères aujourd'hui).
L'effet prévu par IBM était que tout le monde allait se rallier à ce nouveau bus, qui était plus performant que le bus ISA de l'époque. Donc, les royalites allaient pleuvoir et les grands pontes d'IBM pourraient se rouler dans encore plus de pognon qu'ils n'en avaient déjà. La réalité a été toute autre. A cette époque, le matériel informatique était vraiment très cher (par exemple, 1000 francs les 4 barettes de 256KB de RAM en 1992). Le bus MCA étant incompatible avec toutes les cartes d'extension ISA (cartes réseau, ports jeux, cartes graphique, cartes son, etc...), il faudrait donc tout racheter. Cela représentait une fortune pour n'importe qui. Encore plus pour les fabriquants des dits cartes, qui devaient payer IBM pour le droit d'en faire.
Bien peu l'ont fait, le marché ISA était bien plus juteux. Donc IBM s'en est rentré tout penaud, et le bus MCA a été reclassé pour être inclu dans certaines configurations de mainframe de chez IBM.

Cet exemple est édifiant, car à une époque où l'industrie du PC était encore jeune, un poids majeur n'a pas réussi à faire dévier le marché d'un pouce par rapport à l'existant. Maintenant, des années après, le matériel coûte bien moins cher, mais il est présent en bien plus grand nombre. Et, alors que le bus MCA avait peu d'implications pour les logiciels à l'époque, aujourd'hui c'est toute la productivité de l'entreprise qui se trouvait d'un coup mis au rancart.

Et Intel pensait vraiment pouvoir convaincre les sociétés de tout jeter pour le seul plaisir de tout remplacer ? C'est inouï.